Vous est-il déjà arrivé un soir de réveillon de croiser le père Noël égaré dans votre propre cheminée ? Ou vous êtes-vous déjà endormi dans votre petit lit douillet et réveillé quelque part entre Pitchik et Pitchouk étoilé et numéroté ? Non ? Alors réjouissez-vous car ce conte est pour vous.
Une très vieille personne - de mon âge, c'est tout dire - me confia sous le sceau du secret la recette de ce conte de Noël à déguster chaud ou froid, à Pâques ou à Roch Hachana, avec un thé citron ou un verre de vodka, seul ou avec la terre entière, à l'hosto ou chez soi près de sa cheminée Napoléon III : cueillir quelques brins de passé, de présent, de mémoire et d'oubli. Ajouter des rires d'enfants, plein la casserole, et des larmes à gogo, un père Noël standard avec sa mère Noël. Saupoudrer le tout d'un nuage de fleur d'oubli. Couvrez et laissez mijoter à feu doux. Pourquoi l'oubli ? Pour obliger la mémoire infidèle à se souvenir de ce qui fut et qui n'est plus, de ceux qui furent et disparurent.
Il était une fois, dans un grand bois, une pauvre bûcheronne et un pauvre bûcheron.
Non non non non, rassurez-vous, ce n'est pas Le Petit Poucet ! Pas du tout. Moi-même, tout comme vous, je déteste cette histoire ridicule. Où et quand a-t-on vu des parents abandonner leurs enfants faute de pouvoir les nourrir ? Allons...
Dans ce grand bois donc, régnaient grande faim et grand froid. Surtout en hiver. En été une chaleur accablante s'abattait sur ce bois et chassait le grand froid. La faim, elle, par contre, était constante, surtout en ces temps où sévissait, autour de ce bois, la guerre mondiale.
La guerre mondiale, oui oui oui oui oui.
J.-Cl. G.
Prix spécial du jury du prix des Libraires 2019.
Prix des lecteurs L'Express/BFMTV 2019.
C'est durant la réception internationale de La Plus Précieuse des marchandises que Jean-Claude Grumberg perd Jacqueline son épouse.
Depuis, jour et nuit, il tente de lui dire tout ce qu'il n'a pas pu ou pas osé lui dire. Sans se protéger, ni rejeter ce qu'il ne peut ni ne veut comprendre, il dialogue avec la disparue.
Incrédulité, révolte, colère se succèdent. Dans ses propos en cascades, réels ou imaginaires, qui évoquent la vie de tous les jours, Grumberg refuse de se raisonner, de brider son deuil. Les jeux de mots, l'humour, l'ironie, l'autodérision n'y changent rien.
Dans ce livre, où alternent trivialité et gravité, entre clichés et souvenirs, l'auteur dit la difficulté d'exprimer ce qu'il ressent.
Jean-Claude Grumberg fait son livre « pour et avec » Jacqueline, exaltant l'amour et l'intimité de la vie d'un couple uni pendant soixante ans.
Comme un funambule sur son fil, Pleurnichard guide Jean-Claude Grumberg dans la traversée de sa vie. L'un se cachant derrière l'autre, tous deux tentent de vaincre leur peur en la proclamant.
" [...] Comment se venger ? de quoi ? Pleurnichard avait trouvé inconsciemment son moyen : insulter les flics, les douaniers, les préposés à l'état civil ou tout autre fonctionnaire rond de cuir et manches de lustrine, les instituteurs, les contrôleurs SNCF et RATP, tous ceux qui incarnaient plus ou moins à ses yeux le pouvoir, l'autorité. Voilà. [...]
Drôle de manière de se venger dites-vous ? Sans doute. Refuser la société même au sein des organisations dont le but avoué semblait être la destruction de cette société, se faire un devoir d'y râler, d'y ricaner, d'y douter, d'ironiser. On tue ton père et tu ne te venges pas. Hamlet. La pièce était faite. Faire ou défaire, voilà la question. [...] "
" En fait, je n'ai jamais su vraiment me comporter devant le malheur absolu. Faut-il pleurer, s'arracher la tête et la piétiner, ou rire à en crever ? Désormais, pour être sûr d'être tout à fait humain, je m'efforce et m'efforcerai de faire les trois ensemble. "
J.-Cl. G.
Jean-Claude Grumberg est l'auteur d'une trentaine de pièces de théâtre, jouées partout dans le monde, et scénariste de films (avec Truffaut, Costa-Gavras etc.). Il a publié au Seuil, dans la même collection, Mon Père. Inventaire (2003, " Points ", 2010).
Pour un ex-apprenti tailleur désireux d'honorer la mémoire d'un père ex-tailleur pour hommes et dames, livrer un ouvrage si décousu frise l'indécence. Il est vrai que, de l'avis même des nombreux patrons - dix-huit en quatre ans - chez qui j'ai tenté d'apprendre le métier, je parlais trop en bougeant les mains afin de faire rire mes voisins pour être capable de coudre droit ou de réaliser une belle poche passepoilée. [...]
Pendant ces travaux d'inventaire, tout en taillant et retaillant dans la fragile étoffe qui s'effiloche si vite, j'ai laissé venir à moi bien des souvenirs d'enfance, d'adolescence et, pourquoi le cacher, du troisième âge aussi. J'ai même rédigé en guise de note de lecture une sorte de conférence consacrée à la haine criminelle coiffée du chapeau de médecin que j'ai intitulée Une leçon de savoir-vivre. Titre qui aurait parfaitement convenu à l'ensemble de l'ouvrage si je n'avais pas fait le choix préalable de Mon père. Inventaire. Cette Leçon, que vous trouverez en fin de volume, ce collage de textes ignobles, m'a paru un autre chemin - toujours l'arlequinade - pour évoquer et honorer la mémoire de mon père.
J.-Cl. Grumberg
Par bravade autant que par panache, la « patronne » de l'Éden Théâtre, qui fut jadis célèbre comme chanteuse de variétés, a décidé de lutter. Contre les années qui creusent les rides et accusent la fatigue. Contre les difficultés et les tracas qu'elle éprouve pour monter son spectacle dont le titre sonne comme un défi : « Foutez-nous donc la paix ! » Contre la bêtise et la lâcheté universelle. Contre la situation politique qui se dégrade et un certain M. Hitler qui fait planer en cette année 38 une terrible épée de Damoclès sur le théâtre du monde en général et l'Éden Théâtre en particulier. À cette femme indomptable et passionnée, la grande Simone Signoret prêtait dans le téléfilm dont ce roman est issu, et où elle jouait son dernier rôle, son inoubliable voix rauque, son légendaire « casque d'Or » et son courage...
A travers des pièces inédites, des textes-programmes, des essais et documents, « Théâtre Ouvert », en suscitant un théâtre de création, se propose de participer au théâtre de notre temps, un théâtre qui dérange en refusant l'acquis. « En r`venant d'I'Expo ». 1900 : l'Exposition Universelle, le Père Peinard, le Caf'Conc', les noces de l'Industrie et des Empires coloniaux, le syndicalisme d'action directe, les « Forces de la Joie et de la Chanson ». 1914 : la guerre « fraîche et joyeuse » l'Union Sacrée. Pourquoi ? Comment ? Faisant resurgir les éléments enfouis de la mémoire collective, sans pour autant rouvrir un procès, la pièce utilise les meilleures techniques du récit cinématographique, permettant ainsi au spectateur de s'immerger dans cette « Belle Époque » qui se trouve, en fait, pour nous, à des années-lumière de distance historique. Chansons, discours de tribuns, propos de cafés ou invectives de réunions syndicales, tout concourt, à travers l'histoire d'une famille de comiques-troupiers, à faire sortir de l'oubli l'enfance d'une nation - la nôtre.